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O Profondeur

VIE CHRETIENNE

Tiré avec autorisation de « The Banner of Truth »

Traduction de Philippe Favre

Le plus mauvais coup porté à la religion chrétienne dans les siècles passés des Eglises de l’occident a été de la vulgariser. Ce travers a toujours été présent dans l’Eglise de chaque âge. Mais dans les époques d’autrefois il y avait des facteurs restrictifs qui ont progressivement disparu aujourd’hui. Nous pouvons supposer qu’il était difficile pour l’Eglise primitive de vulgariser l’Evangile parce que ses membres avaient connu le siècle de Jésus-Christ lui-même et des apôtres. En outre, ils avaient souvent à faire face aux dures réalités du martyre. Dans une telle situation ils ne pouvaient s’empêcher de croire l’Evangile dans sa grandeur et son mystère, même s’il a été souvent mal énoncé sur le plan théologique.

Le Moyen Age fut une période pendant laquelle les notions de miracle, de mystère et de péché étaient étroitement mêlées à la réflexion quotidienne. L’erreur, dans cet âge-là fut d’exagérer le miraculeux et de revêtir les bâtiments, les reliques, les martyrs et les saints d’une aura de mystère d’une manière injustifiable, poussant à la

superstition. Ce fut leur erreur et leur péché et ce fut une grande faute à laquelle le monde moderne peut être reconnaissant d’échapper maintenant par son incrédulité. Mais, il y a au moins quelque chose de bien qui peut être dit en faveur de la perspective médiévale, c’est qu’elle n’a pas, de façon générale, fait disparaître tout le mystère de la foi et ne l’a pas réduit à la «lumière d’un jour ordinaire». Ce sont les réformateurs protestants du 16ème siècle qui ont exorcisé l’esprit de superstition de l’Eglise de leur temps sans détruire une juste appréciation du surnaturel. Ceci est à mettre à leur crédit et les honore beaucoup. Les réformateurs étaient tout d’abord des hommes marqués par la piété. C’est-à-dire qu’ils n’étaient pas premièrement des érudits ou des experts techniques dans la lettre de l’Ecriture. Ils n’étaient même pas premièrement des théologiens académiques. Ils avaient toutes ces capacités et encore plus! Mais, ils étaient suprêmement les hommes qu’ils étaient parce qu’ils étaient des hommes de Dieu et des ministres de Christ. Leurs écrits témoignent de ce fait. Un livre comme «L’Institution de la religion chrétienne» de Calvin -qui est plus un livre sur la foi évangélique qu’un ma- nuel de théologie -en est la démonstration. Les pages des écrits de Calvin sont remplies du sens de la grandeur ineffable de Dieu et du sens de notre obligation à l’ aimer, le servir, lui obéir et le posséder. Calvin ne se contente pas d’apporter des informations à l’esprit. Il lance un défi à la conscience et réchauffe le coeur . Son mobile puissant est de sauver ses auditeurs et pas seulement de les éduquer.

Un sentiment élevé du mystère de la foi fut maintenu et entretenu par les grands théologiens des 17e et 18e siècles. Mais, dans le siècle passé, un changement survint. A part quelques régions plus privilégiées – spécialement celles qui furent favorisées par des réveils – la tendance des chrétiens des cent dernières années en Occident a été de perdre le sens du mystère de la foi. Conséquence inévitable: l’Evangile a été abaissé au niveau de l’homme. Sa profondeur n’a plus été appréciée. Sa sublimité n’ a plus été estimée par la mentalité chrétienne moderne. Sa plénitude n’a plus été saisie par notre âge suroccupé. Et par conséquent, notre caractère, en tant que chrétiens, a reflété de moins en moins «cet esprit d’un autre monde» qui fut jadis la marque du chrétien et que les générations d’autrefois s’ attendaient toujours à trouver chez des hommes professant être convertis. Il est à craindre que la génération future, quand elle jettera un regard sur notre christianisme, devra dresser un terrible constat à notre sujet: nous sommes un âge de nature superficielle dans les choses de Dieu. Je ne nie pas que nous ayons atteint un degré acceptable de rectitude dans la lettre de la compréhension doctrinale en tant que chrétiens évangéliques, mais notre âge est tristement déficient en ce qui peut être défini comme «la grandeur spirituelle». A la racine de ceci, nous trouvons la maladie moderne de la superficialité. Nous sommes beaucoup trop impatients pour méditer sur la foi que nous professons. Nous ne pouvons pas dire «O profondeur» !

Les chrétiens modernes se lassent rapidement quand ils se trouvent confrontés au sérieux de l’Evangile. Mais les hommes se trompent s’ils s’imaginent qu’ils peuvent voltiger comme un papillon d’un engouement religieux à un autre et s’ils considèrent qu’ils ont accompli leur devoir envers Dieu sans jamais faire une pause pour s’émerveiller des hauteurs et des profondeurs de la grâce de Dieu. Ce n’est pas l’écumage rapide de livres religieux ou la précipitation négligente dans l’accomplissement des devoirs dominicaux qui produisent une foi chrétienne forte. C’ est plutôt une méditation sans hâte des vérités de l’Evangile et l’ouverture de nos esprits à ces vérités qui donnent le fruit d’un caractère sanctifié.

Voici trois domaines où il serait profitable pour les chrétiens de cette fin de siècle de retrouver plus de «profondeur» dans la compréhension de l’Evangile.

1. Un sens plus profond de l’horreur du péché

Nous abordons là un sujet où, aujourd’hui, nous avons faussé compagnie aux anciens évangéliques. Le christianisme moderne ne supporte pas ce qui dépasse une confession de péché formelle. Il est généralement accepté qu’un croyant est en droit de vivre pendant des heures et des jours, vaquant à ses occupations et défendant ses intérêts, avec une petite pause pour la prière privée ou l’ adoration publique. Beaucoup de chrétiens de cette classe sont contents d’ articuler un joyeux «Père, pardonne-moi» et poursuivent leur chemin comme avant. Mais une telle pratique prouve une santé spirituelle déficiente.

Est-ce qu’un croyant ne devrait pas répondre régulièrement de ses péchés dans la présence de Dieu? Ne devrait-il pas fréquemment réfléchir sur le caractère odieux du péché à la vue de Dieu? Est-ce que Christ n’a pas été «fait malédiction» et n’est pas mort à cause du péché? Le chrétien ne doit-il pas se rappeler, à l’occasion, que chaque péché commis mérite la colère et la malédiction de Dieu dans cette vie et celle qui est à venir? Il y a un moment, dans la vie d’un vrai chrétien, pour se prendre en dégoût à cause de son péché (cf Ez 36.31). Il y a un moment pour ressentir son impureté et pour la confesser (cf Es 6.5). Si nos théologiens protestants d’autrefois pouvaient parler de leur péché comme ayant le caractère «d’infinité sur infinité» et «d’infinité multipliée par l’infinité» que ne devraient pas dire: les croyants du leur aujourd’hui?

C’est le péché mignon de notre âge de banaliser le péché. Le remède consiste à méditer sur la sainteté et la justice de Dieu lui-même, sur la rigueur et la perfection de ses lois, sur la fin des damnés en enfer, et, par-dessus tout sur les souffrances de notre bien-aimé Rédempteur sur la croix du Calvaire. Le chrétien cesse de faire des progrès spirituels dès qu’il cesse de se repentir. La façon moderne consiste à chuchoter quelques formules de confession comme si le péché n’était pas plus sérieux, aux yeux de Dieu, qu’un manquement à l’étiquette ou une infraction aux bonnes manières à table.

Rappelons-nous que le péché est la contradiction de Dieu. Les grands hommes de Dieu d’autrefois ont regardé leurs propres cours comme un abîme de corruption. Ils avaient raison. C’est quelque chose que nous devrions apprendre de nouveau. Nous pourrions dire de nos péchés «O profondeur».

2. Un comportement plus respectueux dans l’adoration

Il est dit de l’Eglise primitive que son attitude envers Dieu était caractérisée par «la crainte» (Act 2.43) et quelquefois par «une grande crainte» (Act 5.5 et Il). L’apôtre Paul instruit les chrétiens de son temps à se comporter de telle façon dans leurs services publics que si un non-croyant entre, les secrets de son cour sont dévoilés (1 Cor 14.24- 25). Le sentiment de la présence de Dieu le pousse alors à tomber sur sa face en confessant: Dieu est réellement au milieux de vous (v .25). L’ enseignement apostolique met l’accent sur un culte rendu «avec piété et avec crainte» (Héb 12.28). Ailleurs, nous sommes exhortés à mettre en oeuvre notre salut avec crainte et tremblement (Phil 2.12).

Malheureusement cette crainte empreinte de respect a été largement perdue dans les services d’ adoration contemporains. Ceci est dû, en partie, à l’esprit de notre temps qui secrète la superficialité. L’homme moderne se précipite sur un chemin «où les anges craignent de poser le pied». II s’approche de Dieu hardiment et en coup de vent, avec des pensées, des paroles et des émotions sans préparation de cour. En fait, l’ancienne pratique qui consistait à se préparer pour l’adoration à la maison de Dieu en passant premièrement du temps dans la prière est généralement considérée comme désuète et comme une addition pénible à l’agenda religieux du jour.

II est déplorable que beaucoup de services dans les églises évangéliques ne soient pas marqués par «la crainte respectueuse» (Héb Il.7).

Quel dommage que la gravité soit presque partout un souvenir du passé ! Une ignorance coupable est tapie derrière le remue-ménage des cultes modernes. Mais la plus grande faute demeure notre manque de perception de la gloire, de la grandeur et de la majesté du Dieu que nous venons adorer. La règle, dans la maison de Dieu, avant un service, devrait être le silence respectueux qui évite la dispersion et les conversations relatives aux affaires courantes. Toute notre attention doit être mobilisée parla solennité de l’heure pour louer le Tout-Puissant avec nos cours et nos voix et pour écouter sa parole.

Notre entendement doit être rééduqué pour comprendre cette vaste perspective de Dieu, ce qui inspirera notre attitude envers le pasteur et les anciens (Héb 13.7; 1 Thes 5.12,13). Lorsque nous prions notre Dieu, courbons-nous dans sa présence et concentrons nos pensées sur sa grandeur infinie. C’est ainsi que nos cours seront réchauffés et réjouis parce que Dieu «fait grâce aux humbles» (Jac4.6). Mais les indifférents et les irrespectueux s’en iront insatisfaits parce qu’ils n’auront pas «sanctifié le Seigneur dans leurs cours» (I Pi 3.15).

Nous devons faire attention à ce que nous chantons et répandre nos cours devant Dieu avec grâce et non dans un torrent de sons. En écoutant la prédication, nous devons prêter attention à la doctrine et ses applications à nos vies; ne nous permettons pas d’être distraits par une infirmité supposée dans la voix, le style ou la délivrance du sermon. Si nous recevons peu du message, augmentons-en le poids en nous réunissant plus tard avec des amis chrétiens pour discuter les points principaux. En rassemblant les miettes après le service, nous pouvons grandement accroître ce que nous avons reçu à l’Eglise. Nous avons besoin de nous souvenir que lorsque nous venons au culte, nous venons à quelque chose d’excellent et de céleste. De la vraie adoration, nous pourrions dire «O profondeur» !

3. Une vision plus élevée de l’intention de Dieu de bénir le monde

Il est tout à fait évident que l’ apôtre Paul avait ce sujet à l’esprit quand il a rédigé les paroles qui forment le titre de cet article. L’étendue du regard de Paul embrasse le cours complet de l’histoire humaine. Dans l’Ancien Testament, Dieu confinait sa bénédiction à Israël. Dans le présent âge du Nouveau Testament, il confine largement sa bénédiction aux païens. Dans un jour à venir, avant la fin, Israël sera spirituellement vivifié. Il y aura une «plénitude» de salut pour Israël et pour le monde entier.

C’ est une déclaration foudroyante que Paul fait ici, alors qu’ il contemple le plan de Dieu et le voit se concrétiser dans l’histoire: Car Dieu a renfermé tous les hommes dans la désobéissance pour faire miséricorde à tous (Rom 11.32). Cela ne signifie pas, bien sûr, que tous les hommes seront sauvés, mais que tous les croyants seront sauvés. Ils viendront à Christ du sein de toutes les nations et ils attribueront tous leur délivrance de l’ in- crédulité à la seule miséricorde et grâce de Dieu.

Une nouvelle humanité, rachetée et élue selon le dessein divin, est appelée hors des profondeurs du péché. Aucune force sur la terre ne les empêchera d’entendre l’Evangile, d’y croire et de persévérer jusqu’à la fin. Ils seront appelés au pied de la croix en dépit des préjugés de leur éducation et des inconvénients de leurs circonstances personnelles. La grâce ne les conduira pas seulement à céder au Sauveur. Elle créera en eux la volonté, la joie et l’amour pour le faire.

Le fanatique d’une fausse religion sera amené par la grâce à plier le genou devant Jésus-Christ, et l’ancien matérialiste sera changé en un adorateur du seul vrai Dieu.

Toutes les barrières qui séparaient autrefois les hommes seront abolies. Aucune considération de race, de credo ou de rang altérera l’unité en Christ dont les rachetés jouiront enfin. Voilà la destinée qui attend le véritable peuple de Dieu, dont la justice vient entièrement de lui.

Il n’est pas étonnant qu’avec de telles pensées agitant son âme, Paul peut s’écrier «O la profondeur»! Notre Dieu est le seul Dieu. Son dessein unique s’accomplira et triomphera sur terre. Tous ses adversaires et ses ennemis seront réduits à néant. Tous ceux qui l’aiment et le servent hériteront la gloire et l’immortalité. Dieu a encore beaucoup d’élus à appeler par l’Evangile. Notre travail n’est pas vain dans le Seigneur. Que le courage caractérise notre témoignage pour Jésus; prions pour recevoir une vision plus élevée du plan de Dieu. Si nous suivons cette voie, nos Eglises modernes se détacheront enfin de la superficialité de notre temps.


P.F.
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