Série: Les Béatitudes
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Heureux les affligés (4e béatitude)

LA QUATRIEME BEATITUDE

Jean-Pierre SCHNEIDER

« Heureux ceux qui ont faim et soif de justice, car ils seront rassasiés.» Matthieu. 5.6

Les trois premières béatitudes nous ont permis de nous examiner, pour découvrir notre pauvreté spirituelle et notre faiblesse morale ; et nous avons découvert du même coup que le péché en nous a corrompu notre être tout entier, pourtant créé parfait par Dieu. Le péché est à la base de tous les problèmes mondiaux, à commencer par les guerres.
La quatrième béatitude nous montre la solution : si chaque homme recherchait d’abord la justice, il n’y aurait plus de danger de guerre.

Arrêtons-nous sur chacun des termes de cette béatitude.

1. La justice

Jésus dit que seuls ceux qui recherchent ardemment la justice sont heureux. Le monde recherche le bonheur, et il lui échappe toujours. Selon la Bible, le bonheur n’est jamais le but de notre quête, mais il résulte de quelque chose d’autre. Si nous mettons le bonheur avant la justice, nous ne le trouverons pas. Ce ne sont donc pas ceux qui ont faim et soif de bonheur qui peuvent être heureux ; ce sont ceux qui ont faim et soif de justice : ils seront rassasiés.

Même dans l’Église, combien de gens ont l’air de toujours chercher quelque chose qui leur échappe. Ils vont de réunions en réunions, de conférences en conférences, toujours en quête de quelque chose de merveilleux, d’une expérience qui devrait les remplir de joie, voire d’extase. Ils voient d’autres personnes qui ont cette joie, mais eux ne la trouvent pas. Car, justement, nous n’avons pas à aspirer à des expériences extraordinaires. Pour trouver le bonheur véritable, il nous faut rechercher la justice. La joie et les expériences spirituelles sont le don de Dieu ; notre part, c’est de rechercher la justice.

Quelle justice ? Ce n’est pas ce qu’on entend aujourd’hui : une sorte de justice générale entre toutes les nations, qu’on réclame à grands cris. Déjà les philosophes grecs la réclamaient. Et en même temps, on trompe sa femme, son mari, ses partenaires commerciaux.

Avant de considérer l’aspect proprement spirituel, voici quelques considérations sur l’aspect primaire de cette béatitude. Qui n’a pas souhaité ardemment que justice soit faite et que des monstres tels que Hitler, Staline, Mao et leurs comparses, pour ne nommer que les plus féroces du 20e siècle qui ont fait souffrir et assassiner des millions d’êtres humains sans défense, reçoivent le juste châtiment qu’ils méritent mille fois ? Ceux qui lisent la Bible et ont une notion même fragmentaire de Dieu savent que, s’il est amour, Dieu est tout autant justice absolue. Le dernier jugement satisfera entièrement leur soif de voir la justice de Dieu triompher de toute injustice.

Retournons à l’examen de ce que signifie cette quatrième béatitude pour l’enfant de Dieu. Elle s’inscrit dans l’enseignement fondamental de Jésus concernant le chrétien.

Le mot justice peut aussi être rendu par « droiture, rectitude ». Il ne s’agit pas de respectabilité ou de bonne moralité. Le terme justice contient l’idée de « justification », mais aussi (dans notre contexte) de « sanctification ». Car le désir de justice implique le désir d’être libéré du péché, qui sépare aussi bien de Dieu que des hommes.

Or, tout le malheur du monde actuel est dû au fait que l’homme vit séparé de Dieu. Le monde est sous la domination du péché et de Satan. Il agit dans les enfants de la désobéissance, « les fils de la rébellion » (Eph 2.2) ; Satan est leur tyran, et ils n’arrivent pas à s’en libérer.

Mais l’homme ne peut pas non plus se libérer de lui-même, de son propre désir de pécher, de faire le mal. Celui qui a faim et soif de justice aimerait ne plus vouloir pécher. Il soupire après la délivrance de la pollution du péché.

Les trois premières béatitudes dépeignent l’homme libéré de son Moi égoïste : son orgueil, sa vantardise, sa susceptibilité, le désir de protéger ses droits, ses aises, de se glorifier… La quatrième béatitude traite de l’homme qui, ayant vécu cette libération du Moi tyrannique, désire avant tout la sanctification, parce qu’il aimerait être conforme à l’homme nouveau en Jésus-Christ. Cela implique la connaissance de Dieu, la communion avec Dieu, la marche avec Dieu en Christ par le Saint-Esprit.

2. Avoir faim et soif

C’est l’aspect pratique. Avoir faim et soif ne signifie pas que nous cherchons la justice par nos propres efforts. Ce serait la manière du monde, et elle mène au pharisaïsme.

Avoir faim et soif, c’est être conscient de son besoin, qui doit absolument être satisfait, car ce n’est pas un désir passager. C’est un besoin profond, qui fait mal tant qu’il n’est pas assouvi, sans quoi il mène au désespoir, voire à l’agonie, tant la souffrance en est aigüe.

Avoir faim et soif peut se comparer aux sentiments des amoureux : leur désir primordial est de se trouver ensemble, et la séparation fait mal. Le psalmiste s’exprime ainsi :

« Comme une biche soupire après les courants d’eau,
Ainsi mon âme soupire après toi, ô Dieu !
Mon âme a soif de Dieu, du Dieu vivant :
Quand irai-je et paîtrai-je devant la face de Dieu ?
Mes larmes sont ma nourriture jour et nuit,
Pendant qu’on me dit tout le temps :
Où est ton Dieu ? »
(Ps 42.2-4)

Darby l’a parfaitement exprimé ainsi : « Avoir faim et soif ne suffit pas ; je dois être affamé de savoir la pensée de Dieu à mon égard. Quand le fils prodigue avait faim, il se nourrissait des caroubes prévues pour les cochons ; mais quand il était affamé, il s’est tourné vers son père. »

3. Ils seront rassasiés

Etre rassasié signifie simplement avoir ses désirs comblés. C’est là tout l’évangile ! Dieu donne par grâce, et la seule aptitude nécessaire est de savoir que j’ai besoin de lui. « Je ne repousserai personne qui vient à moi » : c’est une promesse ferme ! Et Dieu satisfait immédiatement : je suis justifié par Christ et sa justice ; la barrière de péché et de culpabilité envers Dieu tombe.

En conséquence, le chrétien est quelqu’un qui sait que son péché est pardonné. Il ne doit plus rechercher le pardon par quelque rite ou pénitence, par quelque sacrement ou absolution que ce soit. Il sait tout simplement qu’il est justifié, rendu juste en Christ par la seule grâce accordée en réponse à sa foi en l’efficacité du sang de Christ. Il ne doutera jamais qu’il est rendu juste devant Dieu.

Mais cela ne s’arrête pas là. C’est un processus continuel. Le Saint-Esprit qui habite dans le chrétien dès qu’il a reçu le pardon de Dieu accomplit son œuvre de délivrance : il délivre de la puissance et de la pollution du péché. Il produit en lui la volonté d’exécuter ce qui plaît à Dieu. Cette purification qui suit le pardon se fait peu à peu ; elle n’est jamais finie. Mais le bonheur intérieur qui en découle est immédiat, bien que l’accomplissement parfait se situe dans l’éternité. Là, chacun de nous sera parfaitement juste devant Dieu, corps, âme et esprit. Dans un sens, le chrétien est déjà parfait ; dans un autre, il deviendra parfait à la venue du Seigneur. La perfection actuelle est virtuelle (c’est-à-dire que les conditions essentielles à sa réalisation sont présentes) ; la perfection à venir sera réelle.

C’est une vie fascinante ! Le chrétien a faim et soif et, en même temps, il est rassasié. Et plus il est rassasié, plus il a faim et soif de justice. C’est l’essence de la vie chrétienne : une sanctification jamais atteinte, toujours en devenir, menant de gloire en gloire.

Cette béatitude permet de nous éprouver quant à notre condition et notre position.

Éprouvons d’abord notre doctrine. Cette béatitude est une réponse aux deux objections principales faites à la doctrine du salut :

1. « C’est trop facile ! » Dieu pardonnerait simplement, ferait grâce sans aucun mérite personnel ?
2. Si l’on répond en montrant que le salut implique une marche avec Dieu, une sanctification progressive, une vie de prière et de lecture biblique régulière, alors « c’est trop difficile ».

D’où il faut conclure que celui qui proteste contre le salut pour l’une ou l’autre de ces deux raisons confesse qu’il n’est pas chrétien du tout (pas né de Dieu).

Quant à nous, chrétiens nés de Dieu : comment peut-on voir que nous avons faim et soif de justice (de droiture, de rectitude) ? Je vous propose cinq questions-test pour nous éprouver.

1ère question-test

Sommes-nous conscients que notre propre justice est fausse ? trompeuse ? erronée ?

Tant que je n’ai pas compris que ma propre justice n’est rien (« un vêtement pollué », Es 64.5), je n’ai pas faim et soif de la justice de Dieu. Paul écrivait aux Philippiens que tout ce qu’il avait été et fait avant sa conversion était du « fumier » (ça pourrit, et ça pue…). « Rien de bon n’habite en ma chair » (Rom 7.18): en sommes-nous convaincus ?

Mais attention : cela ne veut pas dire que « de toute façon je ne vaux rien, donc à quoi bon ? » Non, cela veut dire : « Par Christ, je peux tout ! pas par moi-même, mais en mettant ma confiance en lui. Il est ma justice, il est ma sainteté. J’aimerais être comme lui, ou comme Moïse, ou Abraham, ou David. »

Là, je placerai un avertissement. Il est possible d’être comme eux d’une fausse manière, de désirer les bénédictions dont ils bénéficiaient sans vouloir vivre comme eux. Balaam est un exemple typique de cette attitude. Il dit : « Que je meure de la mort de ceux qui sont justes (droits), et que ma fin soit semblable à la leur » (Nom 23.10). Balaam voulait bien mourir comme les justes, mais il ne voulait pas vivre comme eux. Il livra les fils d’Israël à l’idolâtrie et à la débauche (Apoc 2.14). Il faut avoir vécu comme les justes pour mourir comme eux.

2ère question-test

Est-ce que je refuse de marcher là où je risque d’être pollué ?

Si j’ai faim et soif de justice, j’éviterai tout ce qui s’oppose à la justice. Si, d’une part, je ne pourrai jamais devenir vraiment comme Jésus, d’autre part je peux arrêter de m’exposer à la souillure. Il y a deux aspects à cela :

1. Certaines choses sont carrément opposées à Dieu et à sa justice. Si j’ai faim et soif de justice, je les éviterai comme la peste. On évite le contact avec une maladie infectieuse. Le même principe s’applique à l’infection spirituelle.
2. Il y a des choses qui sont inoffensives en elles-mêmes, mais qui ont tendance à nous rendre moins alertes, moins exigeants spirituellement. Si nous trouvons que nous y accordons trop d’importance, trop de temps, il faut les éviter. L’appétit peut être gâté par des gâteries entre les repas. Si je trouve que certains passe-temps, même si c’est quelque chose de parfaitement légitime (comme le sport, une collection de timbres, la télé, la lecture,…), diminuent mon appétit spirituel, et si j’ai faim et soif de justice, de sanctification, je leur donnerai moins (ou plus du tout) d’importance. Rien de plus logique !

3ère question-test

Est-ce que je lis la Bible chaque jour ? et des livres qui me l’éclairent ?

Si j’ai faim et soif de justice, je la placerai sous mes yeux sans cesse. Il faut de la discipline dans ce domaine. Il faut suivre un plan qui me permette de faire connaissance avec la Bible entière. Personne n’est trop occupé pour lire la Bible quotidiennement. Quand on veut, on peut ! Il est extraordinaire de constater comment on trouve le temps de faire ce qu’on veut vraiment faire.

4ème question-test

Est-ce que je recherche la compagnie de ceux qui ont faim et soif de justice ?

Ce n’est pas pour rien que le NT nomme la nouvelle société créée par Jésus-Christ un corps : chaque membre a besoin de l’autre ; aucun chrétien ne peut se suffire à lui-même. S’isoler en ermite est une solution erronée. Chacun a besoin d’autres chrétiens, qui ont besoin de lui. Je sais ce que c’est d’être sans église, sans communauté de frères et sœurs. On doit se contenter de substituts. J’en ai fait l’expérience en Afrique – et ici en Suisse. On est membre du corps de Christ aussitôt qu’on lui appartient, mais quel privilège de l’être tangiblement en se rattachant à une église locale ! Si j’ai faim et soif de justice (de droiture, d’honnêteté, de liberté fraternelle), je ne désirerai pas passer mon temps avec ceux qui s’y opposent ou s’en moquent, mais avec ceux qui la recherchent ardemment comme moi. C’est un test sûr de ma faim et soif de justice.

5ème question-test

Combien d’importance la prière a-t-elle dans ma vie ?

La prière est un don que Dieu peut me donner. Combien de temps est-ce que j’y consacre ? Non pas que le temps en soi ait une grande importance ; prier « en esprit et en vérité » est primordial. Quand je lis les biographies d’un Hudson Taylor, d’un George Müller, et quand je considère Jésus ou l’apôtre Paul – j’ai honte. Ils passaient beaucoup de temps en prière.. Un vieux frère disait : « La réunion de prière est le baromètre de l’église. » La prière n’est-elle pas aussi le test par lequel pourrait se mesurer ma faim et soif de justice ? Je me sens tout petit devant vous en disant cela.

Je résumerai toutes ces questions en une seule question générale : puis-je dire tout à fait honnêtement que ce que je désire par dessus tout, c’est de vraiment connaître Dieu et de ressembler à Jésus ? de vivre de telle manière à honorer et glorifier Jésus-Christ ?

Contemplons donc la personne de notre Seigneur. Voilà comment nous devrions vivre, ce que nous devrions être.

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