Série: Histoire de l'église
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Contre-réforme ou renouveau catholique ? (11)

Histoire de l’église

à partir de 1545

Introduction

Les articles précédents de cette série considéraient les trois grands réformateurs protestants : Zwingli, Luther, et Calvin. Chacun d’eux avait sommé l’ église de Rome de renier ses erreurs et superstitions, tant dans leurs écrits que dans les débats oraux auxquels ils avaient été confrontés.

Pourquoi l’ église Catholique Romaine (ECR), après tant de siècles de pouvoir suprême, était-elle contestée ? Avait-elle vraiment besoin d’un renouveau spirituel ? La réponse diffère selon la tradition religieuse du commentateur. Par exemple, le pape Adrien VI, en 1522, en parlant de la Réforme allemande inspirée par Luther dit :  « Nous reconnaissons que Dieu a permis cette persécution (sic) de l’ église à cause des péchés des hommes et particulièrement des prêtres et des prélats. » De son côté, le directeur du Séminaire Universitaire de Lyon, J. Colomb, dira en 1947 que Luther a créé une fausse réforme, en déchirant l’ église par des attaques contre le pape, «  le plus grand malheur qui soit arrivé à la civilisation occidentale », selon lui.

Revenons en arrière et évaluons la réalité à la lumière de l’histoire. Au xiii e s., le pape domine sans conteste sur le clergé, les rois et les princes. Il contrôle la politique des états, et commande des expéditions militaires là où il le désire. L’ECR est le centre du monde occidental. Le xiv e s. va modifier la donne :
– Les rois et princes recherchent leur indépendance de l’ECR. Celle-ci élit trois papes en même temps par trois conciles contradictoires, pour gérer leurs pays.
– La guerre de Cent Ans et la peste ravagent l’Europe. La vie est trop courte pour ne pas en profiter.
– Le clergé s’intéresse à l’argent et oublie « le troupeau ».
– L’art, les idées, la littérature de la Renaissance italienne glorifient l’Homme et la Nature, et paganisent toute la société.
– L’évangile est oublié, voire nié.
– L’ECR brille moins par sa sainteté que par ses richesses matérielles ; ses papes commandent de somptueux palais.
– La papauté ne guide plus les peuples selon la Bible.

Le xve s. ne fait pas mieux, mais voit apparaître des individus et de petits groupes qui reconnaissent que l’ECR court à sa perte et nécessite une réforme en profondeur. La papauté s’intéresse moins à ses missions qu’à une vie de luxe, voire d’immoralité, à sa puissance politique (les états papaux), ou aux arts.

La question se pose : comment réformer la papauté pour pouvoir redresser toute l’ECR ?
1. Attaquer la papauté qui existe depuis le temps des apôtres (sic) pour refaire du neuf ?
2. Rester fidèle à l’ECR par une réforme de l’intérieur, parce que le pape est le successeur de Christ, de Pierre, et que les traditions sont bonnes, quoiqu’un peu souillées ? On ne tue pas un malade, on applique des régimes pour le guérir !

Cette dernière option motive Zwingli et Luther… en vain. C’est donc la première solution qui est appliquée sans concession (même si des négociations perdurent entre les « protestants » et l’ECR jusqu’en 1541). Les Réformateurs apportent suffisamment de preuves bibliques et historiques démontrant que l’ECR s’est détournée du chemin évangélique depuis des siècles : il faut revenir aux principes du Nouveau Testament !

La réponse de la papauté est curieuse, parce qu’inconsciente du danger. Les évêques et prélats sont absents de leurs charges. L’ECR ignore le profond mécontentement de la masse populaire. Ce n’est qu’à partir de 1519 que Léon X, puis Adrien VI (en 1522), prennent au sérieux la menace… mais trop tard. Les dés sont jetés en 1520 par la publication de La Captivité babylonienne de Luther. Pour Erasme,  « la brèche est irréparable ! ». Adrien VI (1521-1523) tente de petites réformes, mais il est menacé d’assassinat et d’empoisonnement ! Paul III (1534-1549), lui, est une vraie énigme : il veut une réforme en purifiant la Curie, en s’entourant de conseillers à la bonne moralité (Contarini, Carafa, Pole, Sadolet), en transférant le contrôle de l’Inquisition de l’Espagne à Rome, et en créant le Concile de Trente, mais en même temps, il mène une vie des plus immorales, et promeut tous ses enfants illégitimes !

Des origines plus anciennes que la Réforme

La « Contre-Réforme catholique » démarre vraiment à partir 1545 pour s’achever en 1648. L’ECR préfère à cette expression les termes de « Réforme Catholique » ou de « Renouveau Catholique »… et elle n’a pas tout à fait tort ! Est-elle seulement une réaction à la rébellion protestante en Suisse, en Allemagne, et à Genève ? Non ! On est surpris d’apprendre que l’idée d’une réforme de l’ECR avait débuté au xv e s. dans la très catholique Espagne !

Quelques éléments de réforme et de réveil dans l’ECR précèdent la Réforme protestante. Ces deux Réformes s’opposent sur bien des points, mais offrent quelques similitudes : toutes deux s’appuient sur un passé en commun, elles conduisent à un réveil de la prédication biblique et populaire, elles favorisent un mysticisme pratique1.

En Espagne

Des personnalités comme le cardinal X. de Cisneros, F. de Vitoria ou la fervente reine Isabelle de Castille espéraient ardemment une réforme bien catholique en Espagne. Ils sont plusieurs à constater que l’ECR espagnole est tombée bien bas sur le plan spirituel. Un des sombres aspects de ce pieux désir se manifeste dans les pouvoirs accordés à Tomas de Torquemada vers 1478 pour établir l’Inquisition : tout Espagnol, sans exception, y compris juifs et musulmans, se doit d’entrer dans l’ECR, en se convertissant et en acceptant le baptême. Et gare aux hypocrites, le poteau leur est réservé ! En 1492, les juifs sont expulsés, et plus tard, c’est le tour des Maures.

Fait intéressant, le cardinal Ximénez de Cisneros publie entre 1514 et 1517 la Bible complutensienne polyglotte (d’après le nom latin de la ville, Complutum) : l’AT est en hébreu, en araméen, en latin (la Vulgate) et en grec ; le NT, lui, est en grec. Pourquoi une telle publication ? Tout simplement, parce qu’il veut favoriser un retour à l’étude de la Bible parmi les séminaristes de l’université d’Alcala. Cette université est fondée en 1500, et accueille ses premiers étudiants en 1508.

La réforme espagnole possède donc une base solide. Mais tout cela donne l’illusion que l’ECR retourne à la pureté de l’ère apostolique. Toute dissidence est fortement réprimée.

Une certaine piété médiévale, un mysticisme quiétiste et une scolastique rénovée sont le fer de lance d’une nouvelle force religieuse : un réveil de l’ascétisme et du monachisme. Le mysticisme ascétique minimise l’importance des sacrements et de la médiation sacerdotale. Certains théologiens remplacent la dialectique aride de la scolastique par un retour à l’étude assidue des Pères de l’ église, développant ainsi une nouvelle théologie dogmatique et morale.

Telle est, en résumé, la vie spirituelle en Espagne avant l’apparition de Luther.

En Italie

Contrairement à ce que l’on peut penser, il y a à l’époque des individus et des petits groupes qui espèrent, ici et là, une réforme de la part de la papauté. Par exemple, cinquante prélats et laïcs de convictions diverses se mettent solennellement ensemble dans « l’Oratoire de l’amour divin » en vue de maintenir le catholicisme traditionnel sous la direction de la papauté : ils espèrent faire revivre la spiritualité de l’âme individuelle par la prière, la prédication, l’écoute des sermons, l’emploi fréquent des sacrements et par les « actes d’amour ». Ils regrettent la détérioration progressive de la moralité, l’ignorance et la superstition des masses, le manque de sincérité d’une grande partie du clergé, le paganisme de la vie religieuse et culturelle, et la misère très répandue du peuple que la façade de la Renaissance ne peut plus cacher. Une querelle entre Clément VII (1525-1534) et Charles Quint s’achève par le sac de Rome pendant des semaines, perpétré par l’armée indisciplinée de l’empereur. Clément est emprisonné pendant six mois ! La repentance jaillit dans les cœurs de beaucoup à cause de ce « jugement de Dieu ». L’Oratoire se disperse. Parmi ce groupe, on trouve des évêques (Sadolet, Ghiberti, Carafa), qui décident de monter une campagne de réforme dans leurs diocèses : ils veulent former leur clergé pour que celui-ci assume ses responsabilités religieuses avec discipline, établir des écoles pour éduquer des jeunes, s’occuper des pauvres, lutter contre les maladies vénériennes, modifier et adapter la scolastique à la situation, maintenir l’orthodoxie théologique de l’ECR par l’étude de la Bible ! Sadolet essaie même d’évangéliserGenève à l’époque de Calvin pour la faire revenir au bercail. Tous avaient pleinement conscience qu’une vraie et durable réforme dépendait surtout du nettoyage de la papauté, rien de moins.

Un nouveau monachisme

De nouveaux ordres sont fondés sur des initiatives individuelles entre 1524 et 1540 pour répondre à des besoins religieux et sociaux criants, sous le règne de Paul III (1534-1549). Ces ordres ne seront pas des systèmes clos : leurs activités et leur influence vont largement dépasser le cadre leurs membres.
– Les Théatins (1524) sont des aristocrates qui se consacrent à une vie rude, pauvre et ascétique, pour montrer l’exemple au clergé séculaire par leur prédication, par l’administration des sacrements, par la création d’orphelinats et d’hôpitaux, et en délivrant des prostituées.
– Les Barnabites (1530), aristocrates eux aussi, instruisent la jeunesse et exportent leur réforme personnelle en Allemagne, en Bohème, en France.
– Les Capucins (1525), de couche populaire, sont les rejetons d’une branche des Franciscains observants ; ils savent s’identifier aux pauvres en prêchant dans leur langage et en s’occupant des malades et des miséreux.
– Les Ursulines (1535) se dévouent à l’éducation des filles sans faire de distinction.
– La Société de Jésus, c.-à-d. les Jésuites, est fondée par Ignace de Loyola avec six amis en 1534 à Paris, mais reconnue par Paul III en 1540 seulement. Elle s’occupe des pauvres et des prostituées, établit des maisons pour des ouvriers et des pauvres. Sa réputation est acquise par une éducation stricte et de qualité auprès des jeunes, par sa capacité à faire revenir les couches populaires à l’ECR, et par sa promotion d’une ardeur religieuse personnelle en employant la confession et les « exercices » spirituels.

Le temps des grandes manœuvres

Peu à peu, l’esprit du renouveau pénètre au sein la Curie romaine, y compris sous Clément VII ; mais c’est à Paul III (1534-1549) qu’il revient de lancer une réforme : il convoque enfin un concile digne de ce nom, sous la pression de Charles Quint ; l’empereur veut briser le mouvement protestant, qui perturbe l’unité religieuse et politique de l’Empire. La stabilité de ce dernier dépend d’une ECR unie et puissante. Le pape veut déterminer clairement de quelle réforme a besoin l’ECR avant de se lancer dans cette vaste entreprise. Il crée une commission de neuf cardinaux droits et compétents pour enquêter sur la situation. Les constats effraient Paul III au point qu’il ne les publiera jamais ! Les voici : la papauté est sécularisée, elle croit que son pouvoir est si absolu (déjà une ombre de 18702 !) qu’elle peut vendre des offices pour son seul profit ; la défection des fidèles vient principalement de la vénalité des personnes haut placées ; l’absentéisme des cardinaux de leurs diocèses, les anciens ordres monastiques trop laxistes, la vente scandaleuse des indulgences, le soutien actif à la prostitution à Rome, l’influence païenne dans les écoles, etc.

Pour comble, les protestants ont pu se procurer une copie du document, et l’ont utilisé contre l’ECR ! Paul III a toutefois consenti à purger quelque peu la Curie, et même la ville. Les pays catholiques ont bien apprécié ce début de nettoyage. Après maints obstacles et péripéties, le pape a pu réunir le Concile de Trente en 15453. Paul III fixe au Concile trois objectifs : triompher de la division religieuse des protestants ; réformer l’ECR ; libérer les chrétiens du joug turc. Paul III s’octroie le contrôle de l’Inquisition en fixant à Rome le centre de décision.

à partir de Paul III, tous les papes se concentrent sur l’application des décisions de Trente :
– Pie IV (1559-1565) propose l’idée de l’Index, cette liste de livres que tout bon chrétien ne doit pas avoir entre les mains.
– Pie IV, encore, crée le fameux Catéchisme romain et révise le Bréviaire. Celui-ci est un livre de prières et de lectures à l’usage quotidien du clergé, puis des laïcs à partir de 1971. Il prépare aussi le Missel romain ; c’est un livre de prières et de descriptions des actes liturgiques s’appliquant à la messe pour tous les jours de l’année. Paul VI, cependant, en fera une refonte en 1970, même si le Missel des dimanches est aujourd’hui le plus populaire.
– Pie V (1566-1572) laisse de côté la politique, réforme le clergé, envoie des troupes en France contre les huguenots, aide les catholiques anglais qui essayent de chasser la reine Elisabeth I, félicite le duc espagnol d’Alba pour ses massacres des calvinistes aux Pays-Bas, chasse l’immoralité et la corruption, et supprime l’hérésie protestante à Rome par des autodafés4.
– Grégoire XIII (1572-1585) réforme l’ancien calendrier de la Rome antique. C’est ainsi que nous utilisons « le calendrier grégorien » plutôt que celui de Jules César (utilisé encore par les grecs et russes orthodoxes). Le nouveau calendrier n’a qu’un jour de plus toutes les 3,323 années. Ce pape soutient sans mesure les Jésuites, il crée des universités romaine, allemande, grecque, et anglaise à Rome et aussi des instituts pontificaux pour former des prêtres dans divers pays. Il se réjouit en célébrant un Te Deum aux nouvelles du massacre de la Saint-Barthélemy le 24 août 1572 à Paris, qui a décapité le parti protestant français. Il encourage des révoltes en Irlande contre les protestants, soutient Philippe II d’Espagne et les Guises en France, contre les protestants.
– Sixte V (1585-1590) réforme efficacement les états pontificaux (en Italie du centre), encourage et finance des croisades contre la Turquie, l’Angleterre, Genève, des protestants de Pologne et de Suède. Il pousse le protestant Henri IV à devenir catholique.
– Clément VIII (1592-1605) accomplit des réformes liturgiques, publie une révision érudite de la Vulgate.

Tels sont, en résumé, les actes de quelques-uns des douze papes du xvi e s. qui se sont engagés avec énergie pour réformer l’ECR. Rome considère qu’elle a réussi à préserver l’essentiel de l’organisation, les doctrines et l’esprit des traditions médiévales de la papauté. Toutefois, quant au fond, rien n’est changé.

à la fin du xvi e s l’autorité du pape est fermement rétablie. Il a corrigé les pires abus publics en recrutant de puissantes forces religieuses et culturelles en divers pays pour le bienfait de l’ECR. Il contrôle mieux son administration et la vie spirituelle des peuples.

Pourquoi la Réforme protestante ne perce pas en Italie

Il est impératif pour les protestants que la Réforme triomphe en Italie. Or, ce n’est pas le cas. La désunion politique italienne donne à Charles Quint un motif pour se présenter comme seul défenseur valable de l’ECR, à laquelle il tenait de tout cœur. L’ECR avait une grande et très belle capitale, ce qui, pour les catholiques, prouvait que Dieu avait béni son «  église ». En effet, qu’avaient les protestants de semblable ?! L’Oratoire, créé en 1517, dont le membre le plus important est le cardinal Carafa — qui deviendra plus tard le pape Paul IV — répand son influence au-delà du petit nombre de ses membres déterminés. Paul III fait des meilleurs de l’Oratoire ses conseillers personnels les plus proches, avec succès. Les Capucins, les Ursulines, les Jésuites, se montrent infaillibles dans l’énergie qu’ils mettent pour éduquer garçons et filles, pour sauver les âmes, pour vivre parmi les pauvres une vie exemplaire sur tous les plans. Tout cela contribue à modifier en bien l’image que les Italiens se font de leur église. On veut alors la protéger des idées et des efforts extérieurs pour détruire cette institution qui date de Christ et des apôtres (sic). Ajoutez le fait que les protestants, surtout les chefs, dans le triangle Suisse-Allemagne-France se bagarrent entre eux sur des points de doctrine mineurs, voire s’entretuent (les calvinistes tuent les anabaptistes adultes à cause de la question du baptême des enfants)… Quelle mauvaise publicité ! Les quelques protestants d’Italie ne possèdent aucun grand leader pour les diriger, et surtout ils n’ont pas de force politico-militaire pour les protéger. Résultat : l’ECR reste unie, les anti-papistes sont inconséquents.

La marche de l’Histoire

Ces deux réformes produisirent en Europe un tel creuset de forces et de mouvements opposés, d’idées contradictoires, de guerres meurtrières, de manœuvres et d’alliances politiques complexes, qu’il est impossible de tout relater dans cet article. Il est facile de nos jours de discerner les vérités et les erreurs de tel ou tel acteur de l’histoire, mais il faut bien comprendre que tout arrivait très vite, dans un monde à l’évolution exponentielle sur le plan économique, géographique (découverte du Nouveau Monde), technologique (toujours de nouvelles inventions) ; les échanges d’informations se démultiplièrent aussi grâce à l’imprimerie… Il fallait réagir très vite aux influences extérieures, avant de se faire dépasser par les événements.

Les réformateurs protestants, en tant que pionniers, entamaient leur tâche avec un énorme handicap, souvent seuls, tandis que l’ECR pouvait s’appuyer sur une organisation, une longue histoire et la motivation bien ancrée de sauver le navire. Les catholiques se croyaient sincèrement intègres, tous leurs opposants venant du diable. Ils étaient prêts à tous les sacrifices pour protéger leur « maison » de ces quelques destructeurs. Sur ce point, il est certain que nous, évangéliques, avons des leçons pratiques de détermination et d’engagement à apprendre. Nous vivons en paix actuellement, mais l’ECR — derrière une façade de gentillesse et d’œcuménisme universel — n’a pas modifié sa vision, ni ses buts à atteindre pour régner sur le monde au nom de Christ et de Marie.

Les conséquences internes de la contre-réforme

Finalement, à quoi aboutit la forte réaction réformatrice de l’ECR au protestantisme ?
– Des ruines de l’ECR médiévale ont fleuri une nouvelle piété spirituelle, bien catholique, et une orthodoxie mieux définie, quoique rigide et contraire aux normes bibliques.
– Certains catholiques ont mieux saisi pourquoi ils étaient catholiques par rapport aux protestants, même si l’ECR retient des croyances et des pratiques très souvent anti-bibliques, superstitieuses et médiévales. Tout est devenu cohérent, organisé, et logique pour eux, car ils comprennent pourquoi ils croient ceci ou cela.
– L’expansion missionnaire extraordinaire du catholicisme outre-mer dans les deux Amériques, en Afrique, aux Indes, au Japon, au Sri-Lanka a rencontré des succès fulgurants, le but étant de compenser la perte de larges régions en Europe. L’ECR, ainsi rajeunie, voyait le moyen de retrouver fortune et d’augmenter le nombre de ses membres lui permettant d’influencer la politique et le commerce des pays nouvellement conquis.
– La nouvelle ECR a pu empêcher l’Allemagne et la France de devenir protestants d’une manière écrasante comme en Angleterre, en Ecosse et en Suède. Le renouveau catholique aidait l’Espagne et l’Italie à préserver leurs spécificités religieuse et culturelle.

Conclusion

En tant que protestants évangéliques, les succès de la Contre-Réforme nous attristent, car la proclamation néotestamentaire du salut par la grâce sans les œuvres en a été largement ralentie, voire arrêtée. Le monde évangélique fait face à un « concurrent » exceptionnel qu’il ne peut se permettre de sous-estimer. L’ECR de Benoît XVI peut nous paraître un gentil géant inoffensif. Détrompons-nous, c’est le même colosse qu’autrefois. J’ai entendu le pape actuel, encore Cardinal Ratzinger à l’époque, dire à la télévision française au printemps 2003 que l’Inquisition avait été remplacée par la Congrégation du Saint Office (en 1908), puis par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi (lors de Vatican II, en 1965), mais que l’esprit était resté le même ! Au xvi e s, l’ECR a changé de visage par rapport au Moyen Âge ; mais a-t-elle vraiment changé intérieurement aujourd’hui ?

1 Luther et Ignace de Loyola sont tous deux très touchés par l’Imitation de Jésus-Christ, publiée en 1418 et attribuée à Thomas a Kempis ; 3 000 livres de mystique sont imprimés au xvi e s. en Espagne.
2 En 1870 fut proclamé le dogme de l’infaillibilité pontificale.
3 Un article futur lui sera consacré, car l’ECR du xxi e s. n’est que le prolongement de ce concile, et Vatican II n’a rien changé de très fondamental aux décisions de Trente !
4 Un autodafé était une cérémonie au cours de laquelle les hérétiques condamnés au supplice du feu par l’Inquisition étaient conviés à faire acte de foi pour mériter leur rachat dans l’autre monde.

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Série : Histoire de l'église
McCarty Scott
Scott McCarty a fait ses études en théologie au Dallas Theological Seminary, aux États-Unis. Il exerce un ministère d’enseignement biblique en France depuis 1971. Cofondateur du Centre d’information à l’évangélisation et à la mission à Grenoble, il est membre de Promesses et auteur de nombreux articles.