Série: Les enseignements de l'ancien testament (15)
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Procès de réhabilitation (1)

Les enseignements de l’ancien testament

Et si nous parlions un peu de Jacob, fils d’Isaac ? « Ah oui! dites-vous, Jacob le trompeur ! » – non vous vous trompez. Il y a de nos tromperies dont Jacob aurait rougi…

Tenez c’est un fait que la Bible n’énonce jamais le moindre reproche au sujet de Jacob. Pourtant, il en est peu qui soient autant malmenés que lui, et cela dans la plupart des commentaires, où il est régulièrement traité de trompeur, de manigancer, de fin rusé, et que sais-je. Par contre son frère, que la Bible traite de méprisant, de débauché et de profanateur, c’est le gars sympathique, le bon type qui va à la chasse et apporte à son père du gibier qu’il prépare en venaison succulente, alors que son frère est le faiblard fourré dans les jupes de sa mère.

J’ai mis du temps à découvrir la valeur que DIEU attribue à ces deux frères, et je suis arrivé à des conclusions souvent étonnantes. Non, ce n’est pas Esaü qui est estimable, voir louable, mais Jacob; et ce dernier n’est pas déplaisant et méprisable, mais son frère. C’est là le jugement de la Bible. Vous connaissez cette parole choquante : J’ai aimé Jacob et j’ai eu de la haine pour Esaü, paroles de Malachie que Paul rappelle aux Romains.

Voyons comment la parole de Dieu évalue Jacob et Esaü. J’imagine que vous connaissez les faits saillants de leur histoire, aussi me bornerai-je à des citations révélatrices ici et là. Cela n’empêche pas que vous relisiez Genèse 25.19-28.22, lecture qui vous demandera un quart d’heure.

* * *

Gen 25.21-23 montre que Dieu révéla à Rébecca que le plus grand des deux enfants dans son sein, Esaü, serait le serviteur du plus petit, Jacob. Rébecca n’aura pas manqué d’en informer Isaac. Dieu avait donc choisi Jacob dès avant sa naissance.

Gen 25.27-28 décrit Esaü et Jacob. Esaü était un habile chasseur, épithète qui a la connotation de rusé. Esaü chassait pour le sport, car les nombreux troupeaux fournissaient toute la viande nécessaire. Esaü suivait les traces de Nimrod, vaillant chasseur contre l’Eternel (trad. litt.).

Jacob, lui, est qualifié de tranquille, litt. intègre, même mot employé pour Job: un homme intègre et droit (Job 1.1).

Jacob savait qu’il hériterait des promesses. Esaü aussi, de même qu’Isaac. Dieu avait exprimé sa volonté. Pourtant Isaac préférait Esaü pour une raison de gourmandise: parce qu’il avait du goût pour le gibier (qu’Esaü lui apprêtait). Isaac avait probablement déjà annoncé qu’il donnerait la bénédiction du premier-né à Esaü, qui ne s’y intéressait que par le côté matériel, alors que Jacob désirait avant tout les privilèges spirituels qui s’y attachaient.

Esaü a montré le peu de valeur qu’il attachait au droit d’aînesse en l’échangeant contre une soupe aux pois ! Jacob, connaissant la cupidité d’Esaü lui fit faire un serment. Esaü n’était aucunement obligé de jurer. Vu que Jacob était près des tentes, il y avait assez de possibilités pour Esaü d’apaiser sa faim en faisant quelques pas de plus. – La Bible ne condamne jamais Jacob pour cette action, alors qu’elle condamne Esaü : C’est ainsi qu’Esaü méprisa le droit d’aînesse (Gen 25.34); ce reproche est répété dans Heb 12.16.

Quelles furent les raisons qui poussèrent Jacob à acquérir le droit d’aînesse, tout à fait légitimement d’ailleurs ? D’une part, il savait par Rébecca que Dieu l’y avait prédestiné; d’autre part, il manquait de foi, tout comme Abraham, qui crut devoir aider l’accomplissement de la promesse par Agar. Jacob devait encore apprendre l’efficacité de la prière de la foi. Ne sommes-nous pas tous logés à la même enseigne?

Le moment vient où Isaac se sent vieux (il a cent ans. mais il ne mourra qu à 180 ans), et il veut bénir Esaü. Il ne dit rien à Rébecca, qui sait quel choix Dieu a opéré.
Alors Rébecca s’affole: « ça y est, il va bénir le faux ! » Que faire? Prier, bien sûr ; confiance à Dieu, qui saura bien accomplir son plan. Mais voilà – combien de fois n’avons-nous pas agi ainsi, alors qu’il fallait prier et croire ?…

Rébecca a toujours agi rapidement. Elle fait valoir son autorité maternelle et dit à Jacob: Fais ce que je te commande (27.8). Elle persuade Jacob de se faire passer pour Esaü. Jacob est réticent: il ne veut pas passer aux yeux de son père pour un trompeur (27.12), litt. un moqueur. Jacob ne veut pas que son père pense qu’il se moque de sa cécité, car il l’aime et le respecte.

Rébecca pensait-elle vraiment qu’Isaac se laisserait induire en erreur si facilement? Ou voulait-elle provoquer un choc en faisant réaliser à Isaac, qu’elle aimait, qu’elle mettait même son amour en jeu pour que s’accomplisse le plan de Dieu à l’égard de Jacob ?

Encore une fois, je constate que Dieu n’a jamais adressé de reproche à Rébecca ou à Jacob pour leur action. Au contraire, la suite montre que Dieu y mit sa bénédiction.

1 Sam 16.7 dit: L’homme regarde à ce qui frappe les yeux (ici l’expédient trompeur né du désespoir), mais l’Eternel regarde au cour (ici l’intention de faire réussir le plan de Dieu). C’est pourquoi Jésus avertit de ne pas juger les autres, car Dieu seul connaît le mobile de leurs actions. Telle « belle action » peut être pourrie, alors que telle autre action paraissant répréhensible peut découler d’intentions louables.

Non, il n’est pas question de minimiser l’acte de tromperie exécuté par Rébecca et Jacob. Jacob sera trompé à son tour et ne manquera pas de faire la relation entre son acte et les conséquences. Ce qu’un homme sème, il le moissonnera.

Je vous rappelle cependant un incident dans l’Exode. Les sages-femmes, qui avaient reçu l’ordre de tuer tous les bébés israélites mâles à leur naissance, n’en firent rien. Quand Pharaon les interrogea, elles racontèrent un mensonge flagrant (Ex 1.19) et le v. 20 dit: Et Dieu fit du bien aux sages-femmes (= il les bénit). Il faut en conclure que leur action avait donc eu l’approbation de Dieu. Oui, Dieu a une mesure souveraine, la sienne. De même Rahab, la prostituée de Jéricho, avait menti concernant les espions juifs – et elle est mentionnée parmi les héros de la foi dans Héb 11 ! Le fait de sauver les espions de la mort pesait plus lourd que le mensonge qui leur sauva la vie.

Quand Isaac se rendit compte qu’il avait béni Jacob, le texte dit: il tressaillit d’un grand tremblement très fort (trad. Chouraqui). Car il se rendit tout à coup compte que Dieu l’avait empêché de bénir Esaü, son préféré, contrairement à la volonté de Dieu. Il avait évité de justesse une très grande désobéissance envers Dieu. Quant à Jacob, qui dut quitter son pays pour fuir la colère d’Esaü, qui voulait le tuer, il était loin de penser qu’il resterait pendant vingt ans à l’étranger. Mais tel fut le résultat du manque de foi de Rébecca et Jacob.

Gardons-nous, à notre tour, de « faire arriver » ce que le Seigneur lui-même accomplira à son heure. Combien de fois le Seigneur n’a-t-il pas tourné en bien ce que nous avions mal fait? Ce n’est pourtant pas une raison pour dire que la fin justifie les moyens. Mais retenons : Dieu regarde au cour, aux mobiles; il les voit, lui – pas nous. C’est pourquoi: grande prudence dans nos jugements !

Isaac comprit que le porteur de la promesse devait épouser une croyante. Esaü avait pris deux femmes hittites, donc païennes, ce qui provoqua de la friction dans la famille. Isaac invoqua maintenant la bénédiction d’Abraham sur Jacob : une descendance nombreuse et la possession du pays promis.

Jacob est donc en fuite pour Harân, à 800 km de Beer-Chéba et de sa famille. Après une centaine de kilomètres à dos d’âne ou de chameau, il arrive à Béthel (= maison de Dieu) où Abraham avait bâti un autel. Peut-être qu’une des pierres de cet autel lui a-t-elle servi d’oreiller. C’est là que Dieu lui apparaît pour la première fois et lui parle dans un rêve extraordinaire. (N’allons pourtant pas croire que nos rêves ont normalement une signification profonde !)

Arrêtons-nous à ce rêve de Jacob. L’échelle qu’il voit est hors du commun. Ce mot hébreu n’est jamais utilisé ailleurs dans la Bible; Chouraqui le traduit par escalier. Il représente la communication intense qui existe entre le ciel et la terre. Des myriades d’anges viennent sur la terre pour y exercer les ordres de Dieu et remontent au ciel faire leur rapport. Ne sont-ils pas tous des esprits de Dieu, envoyés pour exercer un ministère en faveur de ceux qui doivent hériter du salut? (Heb 1.14). Dans Apocalypse 19.10 & 22.9, l’ange révèle à Jean qu’il est son compagnon de service, et celui de ses frères les prophètes, et de ceux qui gardent les paroles de ce livre, à savoir la Bible.

Le rêve de Jacob symbolise donc une merveilleuse réalité Jésus s’y réfère en parlant avec Nathanaël : Vous verrez le ciel ouvert et les anges de Dieu monter et descendre sur le fils de l’homme (Jean 1.51). Ici Jésus s’identifie avec l’échelle, le moyen par lequel il est possible de monter au ciel:,il est le seul médiateur entre Dieu et les hommes, étant entré, lui Dieu, dans la sphère terrestre en tant qu homme pour racheter le monde par son sang.

Dans son rêve, l’Eternel renouvelle à Jacob la promesse faite à Abraham, puis à Isaac (Gen 28.13-14). Et Dieu ajoute une quadruple promesse personnelle à Jacob, étonnante en vue de ce qui a été la raison de sa fuite (v.15) :
– sa présence continuelle ;
– sa protection partout;
– son retour dans son pays;
– de ne jamais l’abandonner.

N’y a-t-il pas là une résonance toute messianique, qui nous rappelle la promesse du Christ: à ses disciples; Je suis avec vous tous les jours, jusqu’à l’achèvement de l’âge? Dieu est et a toujours été un Dieu d’amour qui fait grâce à ses élus.

Que fit ce Jacob béni de l’Eternel, à son réveil ? Il offrit un sacrifice d’huile sur sa pierre-oreiller, n’ayant pas de brebis sous la main. Puis il fit un vou à l’Eternel. Il ne s’agit pas là d’un « marché » comme on l’a dit, mais d’un vou de fidélité envers Dieu. L’usage de l’hébreu offre une traduction alternative : Puisque Dieu est avec moi, puisqu’il me donne nourriture et vêtement, puisque je retournerai en paix à la maison de mon père, alors l’Eternel sera mon Dieu: puis il promit la dîme de tout ce que Dieu lui donnera (28.20-22). On le voit: Jacob prit les promesses de Dieu à la lettre ! Sa promesse était volontaire, la loi concernant la dîme n’ayant pas encore été donnée. Il aura peut-être pensé à la dîme qu’Abraham avait donnée à Melchisédek.

On discerne trois éléments dans cette prière exemplaire de Jacob:
1. foi absolue en la promesse de Dieu;
2. vou de fidélité envers Dieu;
3. don volontaire selon les biens reçus.

Cet homme de foi nous interpelle:
1. Jusqu’où va ma foi en la parole de Dieu? Est-elle entière et sans réserve?
2. Suis-je fidèle au Seigneur aussi quand cela déplaît à mon entourage? Mon obéissance est la pierre de touche de ma foi.
3. Comment est-ce que j’exprime ma reconnaissance envers Dieu? Par le don de mes biens? de mon temps? de mes capacités, physiques ou autres? par le don de MA PERSONNE ?

Jean-Pierre SCHNEIDER


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