Série: Fondements
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Le monde

Fondements (2)

A. Vocabulaire

1. Nouveau Testament

  1. «gé» (248 fois, surtout dans Actes, Evangiles, Apocalypse).
    =sol (reçoit la semence)
    =monde à évangéliser: Act 1.8
    =région sous la terre: Phil 2.10
    =pays (terre de Juda/pays d’Israël: Mat 2.6/2.20)
    =terre entière: Marc 13.27
  2. «cosmos» (185 fois, dont 102 par Jean et 47 par Paul)

    utilisé dès Homère (850 av. J. C.) pour: construction/ordre/règles sociales dans la philosophie grecque:le système/l’organisation du monde
     l’univers (notion d’espace)
     l’humanité
  3. «oikuméné» (15 fois dont 8 dans Luc)
    =la terre habitée, terme géographique (dérivé: oecuménique): Luc 2.1; 4.5
    = l’empire romain, terme politique (dès 2e s. av. J. C.): Act 17.6

2. Ancien Testament

Pas de terme spécial qui correspondrait à «cosmos». L’univers: «le ciel et la terre». Le monde est toujours vu en relation avec Dieu, le Créateur envers qui l’homme est responsable de la manière dont il gouverne le monde.

B. Emplois significatifs

1. Nouveau Testament

a) «gé»

«Terre et ciel passeront»: Mat 5.18; 24.35

Ils seront remplacés par «un nouveau ciel et une nouvelle terre»: Apoc 21.1; 2 Pi 3.13.

Par disparition des cieux et de la terre, il faut entendre la disparition de l’organisation du monde pécheur actuel, qui doit être renouvelé en passant par le jugement de Dieu. La rédemption s’étend à tous les domaines de la terre géographique les plus repoussés. Christ a promis que les humbles hériteront la terre (Mat 5.5). Mais comme la terre est le lieu de ce qui est imparfait, les chrétiens doivent penser au ciel où Dieu habite («ce qui est en-haut»: Col 3.2).

Remarque:La terre en tant que planète («érets» en hébreu) est déclarée inébranlable dans ses fondements: Ps 93.1; 96.10; 104.5; 1 Chr 16.30; Ec 1.4.

b) «cosmos»

Philosophie grecque: L’univers est maintenu par un ordre universel (macrocosme). L’homme est un microcosme (petit univers), ce qui lui permet de percevoir l’ordre du monde et d’apprécier sa beauté et la perfection de sa forme sphérique et de son mouvement circulaire. (Pas idée d’une terre plate!)

Platon: Premier à enseigner que le cosmos et la création d’un démiurge (dieu architecte de l’univers) qui «forma le monde selon l’idée de l’être vivant parfait». Le monde est une manifestation de ce démiurge. – Platon: 5e s. av. J. C.

Aristote (4e s. av. J. C.): Sa vue a prévalu pendant 2000 ans en occident. Pour lui, la terre est sphérique, entourée de sphères célestes; elle est le centre immobile de l’univers. Le «cosmos» est la somme totale de tout ce qui est compris dans l’espace et le temps. Au-delà du cosmos, c’est le monde transcendant de Dieu (correspondrait au ciel). Mais: Dieu n’a pas façonné le monde, selon lui. Dieu est «Raison pure»; il anime tout mais reste lui-même insensible et n’intervient pas dans les affaires du monde.

Le stoïcisme: Zénon (4e-3e s. av. J. C.). Il enseignait l’éternel recommencement de toutes choses. [C’est la roue de l’astrologie orientale: il n’y a ni commencement ni fin.]

Néo-platonisme (3e s. av. J. C.): Il y a dualisme entre le monde des étoiles et le monde de la terre, qui est déterminé par le premier. Ce que les hommes font est fondamentalement sans importance.

Gnosticisme (1er s. av. J. C. au 3e s. apr. J. C.): Il y a séparation absolue entre Dieu et le cosmos, qui est une création des puissances démoniaques à partir du chaos, avec l’aide de quelques éléments de lumière. Il n’y a aucun élément divin dans le cosmos. En tant que matière, il est mauvais, négatif, ce qui explique pourquoi le monde est une prison d’où l’âme humaine pré-existante cherche à ce libérer, aidé par la lumière dans la personne du Fils de Dieu.

Développement postérieur: Le monde en tant qu’organisme animé est l’image de Dieu, dont l’homme à son tour est l’image.

2. Ancien Testament

Philon (Juif d’Alexandrie au 1er s. apr. J. C.): Néo-platonisme à la juive. Il distingue entre «cet âge-ci» (sous la domination de Satan, du péché et de la mort) et «cet âge-là» (à venir, sous la domination de Dieu). Pour Philon, le cosmos est animé; il le nomme même «fils de Dieu».

C. Le monde dans le Nouveau Testament

3 nuances:tout ce qui est créé: Act 17.24
 la terre habitée (se rapproche de «oikuméné»): Marc 8.36; Mat 4.8
 l’humanité: Jean 3.16.19; 2 Cor 5.19 (réconcilier le monde).


1. Dans les écrits de Paul

L’histoire du monde est déterminée par l’homme. La mort est entrée dans le monde par la chute de l’homme (Rom 5.12). Le monde entier (l’humanité) est devenu coupable devant Dieu. La création est sujette à la corruption à cause du péché de l’homme.

Paul met en rapport «ce monde» et «cet âge» (ou «l’âge présent»).

NB: «l’âge à venir»:jamais cosmos, toujours royaume de Dieu. Par contre oikuméné (monde habité) dans Héb 2.5.
Le monde «passe»:1 Cor 7.31.

Dans ce monde, Dieu a envoyé son Fils afin de le réconcilier avec lui-même: 2 Cor 5.19. L’Eglise y est le signe de la présence du Christ.

2. La relation de l’Eglise avec le monde

Il n’y a ni rejet du monde ni assimilation au monde!
a) Le chrétien vit dans le monde et a des rapports avec lui: 2 Cor 5.20; Phil 2.15.
b) Mais il doit y vivre comme s’il n’en usait pas: 1 Cor 7.31.
c) Bien que l’Eglise sache que «tout lui appartient», elle-même n’appartient pas au monde, mais à Christ: 1 Cor 3.21-23.

Ainsi: Le monde est le champ d’action où la foi s’exerce dans l’obéissance. Malgré son engagement dans le monde, le chrétien en est libre.

L’épître aux Colossiens montre quelle est la confrontation du chrétien au monde:

Les principautés mondaines ont été vaincues par Christ (2.15).

Donc les éléments du monde ne peuvent être l’objet de vénération rituelle (2.8,20-23)

Le chrétien qui est «mort» aux éléments du monde a été libéré de la contrainte de ses préceptes.

Dans les écrits de Jean: Le monde signifie toujours l’humanité.

En contraste avec le gnosticisme, le monde n’est pas perdu parce qu’il est mauvais par définition, mais en conséquence de la méchanceté de l’homme.

«Dieu aime le monde» est une pensée totalement contraire à la philosophie grecque. Par amour, Dieu y envoie son Fils (Jean 3.16), non pour juger mais pour sauver le monde (12.47) en portant le péché du monde en tant qu’Agneau de Dieu (1.29).

Mais en même temps, le Fils juge le monde qui refuse le salut offert (3.19). Le monde (l’humanité) s’oppose à Dieu, est son ennemi, résiste au Fils, n’y croit pas, oui le hait. Il est sous le règne du prince du monde (12.31; 16.11), du Méchant (1 Jean 5.18). Malgré cela, le Fils est le vainqueur du monde (Jean 16.33). Il n’anéantit pas le monde mais le rachète en créant des hommes nés de Dieu (1.12) et du Saint-Esprit (3.5), qui ne sont plus «du monde» (15.19; 17.14) et échappent à sa domination (16.33).

Dans la théologie chrétienne, le monde a un sens péjoratif. Il désigne l’humanité en révolte contre Dieu. Cela détermine

la position de l’Eglise: Elle est appelée à garder ses distances face au monde, à ne pas l’aimer, ni ce qu’il contient d’anti-Dieu, à ne pas se laisser séduire.

Par contre: Comme Dieu a aimé le monde (l’humanité, les hommes) en y envoyant son Fils, il veut que nous l’aimions (les hommes perdus sans Christ), et il nous y envoie pour être des témoins:
de Sa Parole (la vérité) et
de ses commandements (d’amour). Jean 17.17-18

Jean-Pierre Schneider
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