Série: Les enseignements de l'Ancien Testament
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Psaume 8: Qu’est-ce que l’homme?

Les enseignements de l’Ancien Testament (24)

Le Titre

Les titres des Psaumes ont souvent posé des problèmes. Comment comprendre l’expression hébraïque habituellement traduite «Psaume de David»? On pourrait traduire «pour David» ou comprendre «qui appartient au recueil de David». Il est néanmoins préférable d’y voir une indication de l’auteur du poème. Selon la tradi­tion biblique, David fut un grand poète et musicien. Il a contribué à l’élaboration du culte du 1er temple. Il est donc normal que le recueil des Psaumes ait conservé un nombre important de ses oeuvres. Par ailleurs, l’expression «sur la guittith» soulève une difficulté. Le terme «guittith» désigne peut-être un instrument musical, «la harpe de Gat», ou «un air de chant», ou encore «un festival», une cérémonie particulière.

Le genre et la forme

Ce Psaume est un hymne de louange. David y célèbre le créateur de l’univers et de l’homme en particulier. Loin d’être une notion tardive, la doctrine de la création est attestée très tôt dans tout le Proche Orient et occupe une position centrale dans la vision du monde que nous donne l’Ecriture. Ce poème possède une structure co­hérente. Il commence et se termine par l’exaltation du nom et de la majesté du Seigneur (2, 10). Tout converge ensuite vers la création de l’homme, chef d’oeuvre du créateur (6). On peut le diviser en quatre parties: la majesté et la puissance divines (2, 3); l’insignifiance de l’homme (4, 5); la vocation de l’homme (6, 9); une louange renouvelée (10).

La majesté et la puissance divines (2-3)

Le psalmiste commence par célébrer Dieu. Il le désigne par son nom propre, YHWH suivi d’un titre, notre Seigneur, notre gouverneur C’est le Dieu de l’alliance qui est ainsi identifié, celui qui est fidèle à ses promesses, qui se fait connaître et qui révèle à son peuple le chemin du salut. C’est la gloire du Seigneur que David exalte. En faisant connaître son Nom, Dieu se présente, se dévoile et se manifeste. Sa majesté resplendit dans l’univers tout entier. (2)Lorsque Jésus entra à Jérusalem et fit le ménage dans le Temple, les chefs religieux s’indignèrent à la vue des «en­fants» qui le louaient. Le maître leur répondit en citant le début de ce Psaume (Mat 21.1-16). Le poète établit un contraste entre les enfants et les nourrissons et l’ennemi et le vindicatif Dans un monde marqué par la réalité de la faute et du péché, chacun se situe par rapport à Dieu. «Les enfants et les nourrissons» représentent la fragilité humaine, les humbles qui mettent leur confiance dans le Seigneur et confessent devant les hommes la grandeur de son nom. «L’ennemi et le vindicatif» représentent la puissance humaine, les arrogants qui méprisent et rejettent le Nom et la révéla­tion du Seigneur. Or, face à ses adversaires, Dieu manifeste sa puissance victorieuse par la bouche de ces «petits». Là où l’hébreu a «puissance», la traduction grecque a «louange» (suivi par le N.T.). Cela n’est pas contradictoire. N’est-ce pas la louange des enfants qui révèle la puissance du Seigneur. D’ailleurs dans plusieurs Psaumes où s’exprime la louange, on impute à Dieu majesté et (ou) puissance (Ps 29.1; 59.17; 68.35 et 96.7).

L’insignifiance de l’homme (4-5)

Grâce à la conquête de l’espace, nos contemporains mesurent mieux l’immensité du macrocosme. Comme pour souligner la grandeur de Dieu, le poète compare le créateur à un artiste qui modèle l’univers avec ses doigts! Face au Seigneur, les cieux ne soutiennent pas la comparaison; à combien plus forte raison, la créature humaine. Il n’est rien, ou comme le souligne la genèse, il n’est que poussière. Poussière parce que créature (Gen 2.7), poussière parce que pécheur (Gen 3.19). Le mot hébreu «homme» (5) évoque l’idée de fragilité, de petitesse. C’est une constante de la pensée biblique. Le fils d’Adam est comparé à un souffle, une ombre (Ps 144.3, 4) ou à une fleur qui se fane (Es 40.6-7). L’éphémère de la fumée, voilà ce qui le caracté­rise. La pensée orientale l’a fort bien compris lorsqu’elle compare l’homme à une pierre qui pénètre l’eau et ne provoque aucun remous.

O, insignifiance de l’homme devant la grandeur de la création et la majesté du créateur!

La vocation de l’homme (6, 9)

Mais à la différence de l’Orient, le psalmiste ne s’arrête pas là. Dieu a laissé son empreinte dans cet être de poussière. Cette idée est présentée en deux temps:
a) L’homme est décrit selon sa nature, son essence. Il est créé à l’image du Seigneur. La dignité et la grandeur du terrien sont exprimés par l’exclamation émer­veillée: Qu’est-ce que l’homme… (5). Mais elles sont aussi évoquées par le vocabu­laire de l’intronisation (6). La notion d’image souligne le caractère unique de l’homme:
– Elle signifie effigie, idole, représentation. Pour les anciens, une image participe de certaines vertus, qualités de l’objet ou de la personne. Il s’agit d’une image ressemblante. La créature se définit par rapport à son créateur. Comme Dieu, l’homme est un être personnel. Il pense, il aime et il agit.
– Elle exprime ensuite l’idée de filiation. On la retrouve dans la généalogie de Jésus: Adam est déclaré fils de Dieu (Luc 3.38); Paul va dans le même sens lorsqu’il déclare à Athènes: Nous sommes tous de sa race (Act 17.28).
– Elle décrit enfin un rapport de vis-à-vis. L’être humain est créé en vue d’une relation personnelle, d’une intimité avec le Seigneur dans laquelle la communica­tion, la communion et l’amour ont un sens.
b) L’homme est décrit dans sa fonction. Sa vocation est de dominer la création tout entière. Ce Psaume fait écho au mandat créationnel (Gen 1.26-28). Cet être fragile, de poussière est placé devant une destinée extraordinaire. Cet être personnel a pour vocation d’exercer la royauté au nom de Dieu. Il est sous-gouverneur, gérant, économe du Seigneur au sein de son oeuvre, et il doit y manifester la même bienveil­lante loyauté que le créateur témoigne envers ses créatures. Lorsque Dieu «se sou­vient» n’est-ce pas pour «visiter», intervenir auprès des humains (5)?

Prolongements dans le Nouveau Testament

Comme il y a eu révolte adamique, malédiction du sol, rupture et aliénation au coeur même de l’oeuvre divine (Gen 3), cette domination ne va pas de soi. Elle est marquée par la violence, l’oppression et la destruction. L’ombre de la mort, consé­quence de la faute, plane sur toutes les entreprises humaines, même les meilleures. C’est pour cette raison que Paul et l’auteur de l’épître aux Hébreux appliquent ce passage à Jésus, le nouvel Adam (Héb 2.5-7). Lui seul reflète parfaitement l’image de Dieu en l’homme. Lui seul vit parfaitement la vocation de l’homme. Lui seul accomplit le salut qui apporte délivrance de l’esclavage du péché et redonne au terrien toute sa dignité. C’est pour cette raison que le Christ est le modèle de toute vie chrétienne, d’une humanité renouvelée. (Rom 8.28 et 29) C’est la vocation du chrétien, par la puissance et la sagesse du St Esprit, d’imiter ce modèle.

L’image de Dieu doit resplendir en l’homme. Lorsque celui-ci est touché par la grâce et qu’il est réconcilié avec son créateur et Père, le fils d’Adam devient une nouvelle créature dont la vie revêt une qualité et une dignité toute particulière. (Col 3.9 à il; Eph 4.17 à 24) C’en est fini des pseudo-humanismes matérialistes, idéalistes et idéologiques! Timothée est un bel exemple de cet homme nouveau. Paul dit de lui, qu’il ne cherche pas ses intérêts, mais ceux du Christ. Il se soucie des Philippiens. Il est libre, en Jésus-Christ, de voir son prochain et de lui manifester sa sollicitude, de laisser resplendir l’image que Dieu a renouvelée en lui, et ce, en attendant la gloire à venir. (Phil 2.19-23)

Une louange renouvelée (10)

Comment ne pas s’émerveiller avec le psalmiste de la bonté et de la bienveillance de ce Dieu majestueux et saint, envers cet homme de poussière, une ombre qui passe. Dans sa cantate, «Un combat commença», J. S. Bach l’évoque avec profon­deur et émotion:

«Qu’est-ce donc le pauvre homme, l’enfant de la terre? Un ver, un pauvre pécheur.
Voyez comme le Seigneur lui-même le prend en affection au point de ne pas le considérer comme trop humble et de lui envoyer les enfants du ciel, l’armée des séraphins, pour sa garde et sa défense, et pour sa protection.»

Questions

  1. Comparer le Ps 8 avec les Ps 19 et 104.
  2. Quels sont les points communs entre le Ps 8 et Gen 1.26 à 29, 2.7 et 3.19?
  3. Indiquer la progression de la pensée du psalmiste dans cet hymne de louange.
  4. Comment Jésus cite-t-il le début de ce Psaume, lorsqu’il est interpellé par les principaux sacrificateurs et les scribes (Mat 21.12 à 16)?
  5. Méditer la façon dont Paul et l’auteur de l’épître aux Hébreux ont approfondi l’idée centrale de ce Psaume dans leurs écrits.
  6. Comment ce Psaume vous aide-t-il à mieux accomplir votre vocation d’homme créé à l’image de Dieu?

Pierre Berthoud

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