Série: Le Saint-Esprit donné
Share on FacebookShare on Google+Tweet about this on TwitterShare on LinkedInEmail this to someonePrint this page

Le Saint-Esprit donné (6)

Rappel de l’introduction

Les réflexions qui paraissent et paraîtront sous ce titre s’inspirent du magistral ouvrage de Frederick Dale Brunner: «A Theology of the Holy Spirit – The Pentecostal Experience and the New Testament Witness » (Une théologie du Saint-Esprit – L’expérience pentecôtiste et le témoignage du NT), Hodder & Stoughton, London 1970, 390 p. A ceux qui savent l’anglais, nous ne pouvons que chaleureusement en recommander la lecture. Ce livre est aussi actuel aujourd’hui qu’au jour de sa publication.

La réception du Saint-Esprit est devenue sujet à controverse depuis l’apparition du pentecôtisme en 1906 à Los Angeles avec son prolongement charismatique dans les années soixante. Il est impératif que l’Eglise soit édifiée, aussi en ce qui concerne ce point primordial, uniquement sur la base de l’Ecriture sainte, l’expérience ne pouvant être un fondement valable, pour deux raisons: elle n’est jamais normative; étant subjective, elle n’est pas nécessairement authentique quant à son origine et ses manifestations.

IV. La manifestation de l’Esprit: la foi chrétienne (suite)

C. Le dynamisme de la foi

Selon l’expression inoubliable de l’apôtre Paul, la foi, qui est l’oeuvre de l’Esprit, s’énergise en amour (Gal 5.6). L’exercice de l’amour chrétien a besoin de l’énergie de l’Esprit, qui est reçue par la foi (Gal 3.5).

Dans le NT, l’action d’amour exercée par le Saint-Esprit est considérée sous deux aspects: négativement en ce qui concerne la chair et positivement quand il s’agit du prochain.

1. La chair

L’énergie qui produit l’amour par la foi est en tension constante avec la chair . La vie en Esprit est une vie en guerre contre la chair. Cette guerre ne cesse pas une fois que l’Esprit a été reçu (Rom 8.13). Mais c’est justement parce que l’Esprit a été reçu que le chrétien mène un combat continuel pour «mettre à mort» ses mauvais penchants. Ce combat constitue d’ailleurs pour le chrétien l’assurance qu’il est conduit par l’Esprit, qu’il est donc enfant de Dieu. C’est la raison pour laquelle Paul juxtapose ces deux choses: Si par l’Esprit vous faites mourir les (mauvaises) actions du corps, vous vivrez, car tous ceux qui sont conduits par l’Esprit de Dieu sont fils de Dieu (Rom 8.13-14).

On peut donc conclure que marcher selon l’Esprit et contre la chair signifie «marcher dans l’amour». Cette marche est la manifestation, la démonstration et l’attestation que l’Esprit est à l’oeuvre, qu’il habite le croyant. L’Esprit ne se manifeste donc pas nécessairement par une extase quelconque, mais bien par un comportement éthique. Ce n’est pas le chrétien qui fait preuve d’expériences spirituelles ostensibles ou qui parle d’une manière inintelligible qui manifeste la vie dans l’Esprit. Car l’amour ne supprime pas la conscience du Moi dans l’extase; il exerce une contrainte sur le Moi, qui peut alors se donner à l’autre. L’amour n’est pas tellement l’explosion d’une grande émotion, mais consiste plutôt à maîtriser ses émotions. L’amour est d’abord caractérisé par la patience; dans les moments décisifs, ce n’est pas tellement la langue qui agit, mais les mains (cf. 1 Jean 3.18, où aimer en parole et avec la langue est mis en contraste avec aimer en action et en vérité).

2. Le prochain

La foi chrétienne se distingue de toutes les religions illuministes par le souci du don au prochain. Le gnosticisme, qui prétend au «savoir par excellence» (généralement par initiation), a pour but l’accumulation de «spiritualité» pour soi-même; pour y parvenir, il faut «faire le vide» en soi afin d’être rempli de substance divine (mouvement vertical). Le but de la foi chrétienne, au contraire, est de se vider de soi-même en vue de se donner au prochain – c’est un mouvement horizontal. C’est à cette différence de direction que prend l’énergie que Paul fait allusion quand il écrit: La connaissance (gnostique, voire charismatique) enorgueillit, mais l’amour édifie (1 Cor 8.1).

Le prochain (que l’on voit) est l’objet de l’authentique spiritualité chrétienne; le spirituel (que l’on ne voit pas) est le centre de toutes les variétés de gnose (connaissance) mystique. Cependant, le gnostique (l’illuminé) est séparé de son prochain aussi par ses expériences spirituelles elles-mêmes. Car chacune de ces expériences le fait accéder à un niveau spirituel supérieur de sorte qu’il considère en état d’infériorité le frère chrétien (et toute autre personne) qui n’a pas fait ces expériences. C’est ainsi que se créent inévitablement des schismes.

3. Pertinence particulière de la première épître de Jean

Cette lettre de Jean doit se comprendre dans le contexte du gnosticisme très répandu de son temps. Jean met en contraste la soi-disant «piété supérieure» des gnostiques avec le seul critère légitime de la foi chrétienne -l’obéissance au commandement de l’amour.

Jean détecte chez les gnostiques une incapacité de fonder leur version de la foi en Jésus en tant qu’homme, parce qu’ils opposent ce qui est humain et naturel à ce qui est spirituel et surnaturel (1 Jean 4.2-3). Par ce fait, ils comprennent mal le côté éthique de la vie chrétienne et donnent la priorité aux «choses spirituelles» (aux expériences supérieures) plutôt qu’aux «choses historiques» telles que le frère et le prochain; la perfection est dans l’amour, et non dans l’exaltation «spirituelle» (1 Jean 4.12). Pour l’apôtre Jean, c’est le manque d’amour et non le manque d’expériences spirituelles qui indique qu’un chrétien n’est pas dans le vrai. Le test de l’authentique spiritualité est donc l’amour et non l’expérience spéciale.

C’est la raison pour laquelle Jean refuse aux gnostiques le droit d’être appelés chrétiens (1 Jean 2.4-6). En fait, centrer sa vie dans le spirituel (donc finalement en soi-même) plutôt que dans le Christ incarné correspond à l’esprit de l’antichrist (1 Jean 4.3).

Par conséquent, la forme de piété gnostique n’est plus, pour Jean aussi bien que pour Paul, une forme valable de la foi chrétienne, malgré sa prétention de l’être à un degré supérieur. La manifestation de la vie chrétienne dans la foi, l’espérance et l’amour se réalise concrètement à l’égard du frère plutôt qu’en démonstration de dons (charismes) de l’Esprit.

D. Le centre de la foi

Les déclarations concernant le Paraclet dans l’évangile de Jean constituent le témoignage le plus concentré sur la doctrine de la manifestation du Saint-Esprit et nous serviront de résumé. Ces affirmations sont toutes centrées sur le Christ auquel l’Esprit rend constamment témoignage.

Nous vous proposons de cataloguer la doctrine du Saint-Esprit et son pendant pentecôtiste de la manière suivante:

1. Jean 14.15-17

(a) Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements, et moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Consolateur (Paraclet) qui soit éternellement avec vous.

Ce texte indique ce qui s’approche le plus d’une condition humaine en vue de recevoir l’Esprit. Ce passage porte-t-il préjudice au principe de «par la foi seule» qu’on trouve partout, et notamment dans l’évangile de Jean (7.37-39), en relation avec le Saint-Esprit? En fait, cette obéissance n’est pas une «oeuvre» en plus de la foi mais, selon l’usage de Jean lui-même, un appel à la foi: Ce qui est l’oeuvre de Dieu, c ‘est que vous croyiez en celui qui l’a envoyé (6.29). Si Jean 14.15 est un appel à l’amour, ce que le contexte suggère (cf. 13.34; 15.12, 17), la doctrine du NT est confirmée.

Par contre, il est intéressant de constater que, jusqu’à ce jour, nous n’avons pas découvert le commandement de l’amour dans les listes pentecôtistes énumérant les conditions pour recevoir l’Esprit. Celles-ci tournent toutes autour de l’abandon absolu à Dieu, de «faire le vide», de l’attente dans la prière; tout cela peut se faire en isolation chez soi, d’une manière égocentrique.

(b) L’Esprit n’est pas donné imparfaitement ou d’une manière incomplète, mais de sorte qu’il soit éternellement avec vous.

Le pentecôtisme nie en général que quand l’Esprit est donné «d’abord», il demeure toujours dans le croyant; pour que cela arrive, il faut, dit-il, une obéissance plus parfaite du croyant, sans quoi l’Esprit ne fait que communiquer le salut. Pourtant, Jésus dit en clair que quand l’Esprit est donné, c’est pour toujours.

(c) L’Esprit de vérité ne peut pas être reçu par le monde parce qu’il ne le voit pas et ne le connaît pas. (Notez qu’aux disciples Jésus dit: vous le connaissez, alors qu’ils ne parlaient pas en langues…) La doctrine pentecôtiste enseigne que l’Esprit n’est pas donné pour de bon jusqu’à ce qu’il soit «vu» par une manifestation spéciale, celle du «parler en langues». Sans cette évidence, le pentecôtiste ne croit pas que l’Esprit ait été donné d’une manière permanente.

Le NT en général n’approuve pas la demande de «voir» une évidence spéciale de la présence divine. Quand les Pharisiens demandent à Jésus un signe, Jésus répond: Une génération mauvaise et adultère recherche un signe (Mat 12.38-39). Le dicton populaire «voir, c’est croire» ne s’applique pas à la foi chrétienne; les paroles de Jésus adressées à Thomas se réfèrent particulièrement aux croyants après lui: Heureux ceux qui n ‘ont pas vu et qui ont cru (Jean 20.29).

(d) Il ne peut y avoir aucun doute que Jésus s’identifie intimement avec le Consolateur, le Saint-Esprit, car il dit à ses disciples: vous le connaissez (l’Esprit), parce qu ‘il demeure près de vous et qu’il sera en vous. Je ne vous laisserai pas orphelins, je viens vers vous. L’Esprit de Jésus (l’Esprit de Dieu, le Saint-Esprit) vient en tant que continuateur et non comme substitut, comme la suite le montre.

2. Jean 14.26

(a) Le Père, dit Jésus, enverra l’Esprit en mon nom. L’identification entre le Fils et l’Esprit est telle qu’avec le nom de Jésus l’Esprit est donné.

Selon le pentecôtisme, la présence totale de l’Esprit n’est pas normalement donnée en réponse à la foi au nom de Jésus, mais à partir de certaines conditions allant au-delà de la simple foi. La coïncidence entre le nom du Fils et la venue de l’Esprit est ainsi ignorée.

(b) L’Esprit, dit Jésus, vous rappellera tout ce que moi je vous ai dit. Le moi (accentué dans le texte grec) fait bien ressortir que l’oeuvre de l’Esprit n’est pas indépendante ou supplémentaire à celle du Christ. Il serait salutaire pour les pentecôtistes de savoir que la démonstration réelle de la puissance de l’Esprit est de rappeler Jésus-Christ aux hommes et de les mettre en relation avec lui, non pas de les entraîner au-delà de Christ. Cela ressort dans la suite du discours de Jésus (Jean 15.1-11), qui se présente comme la vraie source de la vie chrétienne. Ce n’est qu’en s’éloignant de Christ (en ne demeurant pas en lui) que le chrétien devient impuissant: Sans moi vous ne pouvez rien faire. Il est à craindre que la recherche d’une seconde source de puissance au-delà de Jésus éloigne le croyant de la seule source de Jésus, que le Saint-Esprit ne supplante jamais, mais qu’il représente (l’Esprit rendra témoignage de moi, et vous aussi, vous rendrez témoignage de moi).

3. Jean 16.7-11

La mission de l’Esprit, à savoir convaincre le monde de péché, fait partie de l’annonce de l’Evangile centrée en Christ. Par la prédication de l’Eglise, l’Esprit pousse les hommes à croire en Christ en les convainquant d’incrédulité (parce qu ‘ils ne croient pas en moi). L’oeuvre de conviction de l’Esprit n’est pas liée à un manque de rechercher l’Esprit. De même, 1′ Esprit.., vous rappellera ne signifie pas un simple rappel à la puissance nécessaire pour le service, celle-ci dépendant de la réalité du Christ dans la vie des disciples, cette réalité étant le fruit de l’action de l’Esprit.

4. Jean 16.13-14

(a) L’Esprit ne fait pas que rappeler et convaincre; Jésus dit aux disciples: il vous annoncera aussi les choses à venir. L’Eglise ne doit pas oublier cette dimension future de l’activité de l’Esprit. Encore faut-il relever que cette activité n’est pas une mission indépendante de l’Esprit, car ses paroles ne viendront pas de lui-même (de sa propre autorité), mais de ce qu’il aura entendu du Christ. Par les apôtres, l’Esprit a annoncé fidèlement les paroles de Christ aussi en ce qui concerne l’avenir.

(b) Jésus dit du Saint-Esprit: Lui me glorifiera, parce qu’il prendra de ce qui est à moi et vous l’annoncera. C’est là le résumé de toute la mission du Paraclet. La manifestation par excellence du Saint-Esprit est la glorification de Jésus-Christ.

Conclusion

Puisque tout a été donné à Jésus-Christ, tout est donné à ceux à qui Christ se donne: Vous avez tout pleinement en lui (Col 2.10). C’est le témoignage unanime du NT par rapport à la manifestation du Saint-Esprit en Jésus-Christ.

Jean-Pierre Schneider
chargé de la traduction-adaptation par la rédaction de Promesses

Share on FacebookShare on Google+Tweet about this on TwitterShare on LinkedInEmail this to someonePrint this page
Série : Le Saint-Esprit donné